« De jour, elle obscurcit la lumière de Dieu et, la nuit,
elle éclaire la terre ; un croissant sous sa tresse brille,
et sur son front une étoile scintille. »
- Alexandre Pouchkine, Conte du Tsar Saltan
Petite, j'ai rapidement abandonné la danse classique, peu persévérante et vexée d'être la seule du cours à ne pas avoir le droit de porter des pointes...
20 ans plus tard, je travaille pour l'Opéra de Paris sur Le lac des cygnes, sans avoir jamais eu un seul pansement aux orteils.
*** Le dessin = la danse des paresseux ***
À partir de ce jeudi 10 octobre, vous pouvez découvrir en librairie Le Lac des Cygnes, édité chez Nathan en partenariat avec L'Opéra de Paris.
En composant Le Lac des cygnes, Tchaïkovski s’empare de la légende de l’oiseau immaculé pour créer l’une des plus belles musiques jamais écrites pour le ballet. Les chorégraphes Marius Petipa et Lev Ivanov donneront leurs lettres de noblesse à l’histoire de cet amour impossible entre un prince terrestre et une princesse-oiseau, et façonneront à leur tour le mythe de la danseuse‑cygne, ballerine par excellence. En créant en 1984 sa version pour le Ballet de l’Opéra de Paris, Rudolf Noureev choisit de lui donner une dimension freudienne, éclairant d’une profondeur désespérée le rêve poétique de Tchaïkovski.
L'album narre le conte original. Nous sommes au château du prince Siegfried, qui se dresse au-dessus d’un lac mystérieux entouré de forêts.
Comme je suis née et que j'ai grandit au bord du lac d'Annecy, habité par de nombreux cygnes, au pied des montagnes, entouré de châteaux... illustrer cet album c'était un peu comme retourner à la maison.
Je me suis inspirée du château de Menthon Saint-Bernard, et j'ai pu me replonger dans les ambiances brumeuses de bord de lac, roseaux, reflets, foret sombre de mon enfance.
Mais contrairement à tous mes précédents livres, ou le décors prend le pas sur les personnages (tellement j'aime peindre les paysages) pour ce conte les corps sont au centre et en premier plan.
Pour peindre les corps des personnages, je me suis directement inspirée de la danse orchestrée par Noureev. C'est même d'ailleurs pour certaines images des instants clés de sa chorégraphie qui m'ont donné toute l'architecture des illustrations.
Pour reproduire sur une image figée des instants chorégraphiés, j'ai recomposé différents moments successifs de la danse, recollé des gestes sur d'autres, transformer des danseuses en cygnes...
J'avais une certaine pression sur la justesse des corps ! À dessiner des postures que je serais bien incapable de tenir... Pour ça, je me suis permise d'utiliser des photos, des moments du ballet de Noureev en pause. J'ai visionné 500 fois le film du ballet (il s'agit d'une représentation à l'Opéra de Paris en 2006, avec Agnès Letestu, José Martinez, Karl Paquette...).
Ce qui m'a interpelée c'est que parfois, si on suit exactement le dessin du corps de la danseuse photographiée, le dessin semble faux, la posture trop "inhumaine", le lecteur n'aurait pas cru à mon dessin trop surréaliste (et pourtant fidèle !) et que j'ai donc dû adapter.
À d'autres moments, à l'inverse, il fallait plus exagérer la posture pour que ce soit expressif en dessin. C'était étonnant de voir la différence de perception entre photo et dessin.
Encore un magnifique album que je vais commander ! J'ai aussi fait de la danse classique étant petite et ado, puis contemporaine et enfin burkinabée, donc je crois pouvoir me prévaloir d'un oeil averti et j'adoooore ! Bravo !
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